La crise sanitaire actuelle a rapidement ouvert la voie à une crise économique sans précédent, et a projeté les banques en première ligne face à la crise, endossant ainsi une grande responsabilité : maintenir l’économie et le pouvoir d’achat à flot autant que possible. En France, les banques sont devenues le trait d’union entre l’Etat et les entreprises avec le Prêt Garanti par l’Etat (PGE). Contrairement à la crise de 2008 où les banques ont été fustigées pour la fragilité de leur système, elles sont aujourd’hui perçues comme un allié robuste.
Or, la crise a paradoxalement exhorté le monde bancaire à se confronter à ses problématiques structurelles en l’espace de quelques semaines : système qui résiste à l’Open Banking, vulnérabilité face aux cyberattaques, modèles incompatibles avec le télétravail… sont autant de facteurs qui révèlent une résistance à la transformation numérique et à l’ouverture qui l’accompagne. La crise accélère la prise de conscience et montre que l’ouverture de systèmes informatiques agit sur la capacité des banques à être résilientes.
Une résilience organisationnelle et philosophique
Le mot « crise » tire son origine du grec Krisis qui signifie « jugement », « décision » suggérant ainsi que la crise sanitaire que nous connaissons constitue un moment charnière dans l’Histoire et a fortiori dans le secteur bancaire. Face à la fragilité de cet équilibre, les banques ont l’opportunité d’opérer un changement profond en basculant vers un modèle d’organisation plus agile. Si cette transition se faisait jusqu’à lors de manière graduelle, la crise démontre la nécessité de l’accélérer à plusieurs niveaux.
Plusieurs groupes bancaires ont mis en place des plans de continuité d’activité (PCA) pour assurer la sécurité de leurs salariés et permettre le recours au télétravail. Or, les banques qui ne possédaient pas de système cloud ouvert nativement ont eu des difficultés à accéder aux informations à distance tandis que les capacités en matière de réseau virtuel privé (VPN) n’étaient pas toujours suffisantes. Le système traditionnel démontre ainsi ses limites : il n’est pas en mesure de répondre aux besoins d’agilité et de flexibilité des banques.
De même, si l’Open Banking est une préoccupation pour tous les acteurs du secteur, déjà impulsée par DSP2, sa mise en application reste complexe. Plusieurs banques françaises tardent à l’adopter car leur paradigme d’origine est plus stoïque que ce l’on a pu envisager. La définition et la mise en place de stratégie d’Open Banking deviennent urgentes car la crise accélère la volonté de générer d’autres sources de revenus et de fidéliser des clients dans un secteur très concurrentiel. Une étude révèle ainsi que 61 % des institutions financières en Europe considèrent l’Open Banking comme une opportunité et pour 69 %, établir des partenariats avec des Fintech est une priorité de ces 12 prochains mois. Les banques ont tout intérêt à adopter une approche qui bénéficierait à la fois à leurs clients et à leurs salariés.
Enfin, les banques ont pris conscience que la crise allait faire émerger de nouveaux comportements auxquels elles devront faire face en proposant de nouveaux services. C’est le cas de la diversification des usages de la carte bancaire comme on a pu le voir avec l’essor du paiement sans contact qui favorise le respect des mesures d’hygiène, et qui a d’ailleurs fait l’objet d’une augmentation de plafond à 50 euros en Mai 2029.
Numérique, processus, cybersécurité… une modernisation qui s’amorce et doit s’inscrire durablement
Les institutions financières ont pris la mesure du rôle du numérique qui s’est révélé essentiel pendant la période de confinement. A la fois vecteur de résilience et de performance, le numérique n’est plus un simple levier à forte valeur ajoutée mais bien le socle d’une mutation profonde. La relation numérique est devenue un mode standard à part entière, s’adaptant aux actions qui avaient traditionnellement recours à une intervention humaine.
Un des enseignements communs à plusieurs grands acteurs du monde bancaire est la simplification des processus bancaires, permettant ainsi de générer un gain de temps considérable en interne. Ces simplifications interviennent à différents niveaux : octroi de crédit , la gestion des concours pour les professionnels et entreprises, gestion des dépassements et vie du compte bancaire etc. La crise a précipité ce qui a été démontré de manière théorique quelques mois plus tôt, et ce, grâce à des processus plus directs et moins formels qui n’obstruent pas la chaîne de validation.
Une des conséquences de la crise est l’accentuation du risque de cyberattaque et d’escroquerie numérique. Le secteur bancaire prend très au sérieux cette menace qui est le troisième risque le plus important selon le rapport de l’Autorité bancaire européenne (EBA). Les banques doivent investir dans la sensibilisation et la formation de ses salariés en matière de cybersécurité, à mesure que l’entreprise s’ouvre et se modernise.
La crise a donc révélé la valeur du numérique et les limites des systèmes historiques fermés. Un bilan doit être tiré de cette période inédite afin de permettre aux banques d’accélérer toujours plus leur implication dans l’ère de la modernisation et de l’ouverture, en toute sécurité et en intégrant les nouveaux usages de ses clients, mais également de ses collaborateurs. L’attractivité du secteur bancaire est en jeu.